mercredi 11 décembre 2019

Pour en finir avec Dieu. Note de lecture.

... par Richard Dawkins. Perrin edit. Coll. Tempus. Paris, 2006.

Athéisme radical

L’athéisme moderne a quasiment trois siècles et la France lui a donné ses meilleurs contributeurs dont Meslier et d’Holbach jusqu’à Onfray.
Avec Richard Dawkins, on est qualitativement deux niveaux de réflexion au dessus de ces derniers. Ajoutons que depuis d’Holbach, des auteurs prestigieux ont affaibli le contenu doctrinal des religions par des essais fameux : Marx, Freud, Durkheim, Renan. Ce gros ouvrage de 521 pages, publié en 2006, examine presque tous les aspects de la question. Le mot ‘presque’ est important puisque la croyance religieuse n’aura plus que quelques interstices pour exister rationnellement. L’auteur place donc la barre très haut : si ce livre répond à mes attentes, écrit-il, les lecteurs qui sont croyants quand ils l’ouvriront seront athées quand ils le refermeront (p.18). Les croyants doivent donc savoir à quoi s’attendre : c’est une bombe qui va leur éclater dans les mains. 
L’auteur distingue 7 niveaux de croyance entre théisme pur (1) et athéisme pur et dur (7), l’agnosticisme impartial se situant au niveau 4. (p.69).  Tout son travail va consister à délégitimer les niveaux 1 à 6.

Le début de l’ouvrage est très bon car Dawkins, spécialiste de l’évolution s’appuie sur le cœur de sa discipline, ensuite, sa grande culture scientifique généraliste lui permet d’intervenir dans les domaines connexes sans trop faire d’erreurs. Évidemment, son argumentaire sur l’évolutionnisme contre le créationnisme est imparable et la plupart des objections qui lui ont été opposées sont de mauvaise foi. L’évolution darwinienne reste bien la meilleure (ou la moins mauvaise) explication du développement du processus vivant sur terre même si son origine précise demeure inconnue. Le point suivant concerne l’admirable et improbable concours de circonstances faisant de notre terre l’espace idéal pour accueillir la vie d’une part, et d’autre part les valeurs précises, miraculeuses pourrait-on-dire des six constantes physiques permettant l’existence de l’univers entier. Seul un dieu muni d’une boite avec six curseurs ne pouvait-il faire cela ? Le principe anthropique explique facilement le premier point : sur les centaines de milliards de planètes (ou plus) de l’univers, la probabilité d’avoir une bonne configuration est quasi certaine de se produire, et c’est parce que nous sommes là pour en témoigner qu’elle s’est produite chez nous. L’extrapolation de cette idée aux constantes universelles est plus arbitraire, mais elle tient néanmoins la route a posteriori. Il n’y a personne dans les univers ratés parallèles pour en convenir. Donc pas de dessein intelligent nécessaire, rien que du hasard. De ceci, il s’ensuit que la Genèse est un mythe ou un symbole qu’il faut intégrer en tant que tel. A moins que le temps et l’espace soient des illusions comme dans l’idéalisme de Berkeley, la Māyā hindoue en quelque sorte, mais notre esprit occidental n’est pas prêt à renoncer au réalisme.

Au passage, Dawkins dénonce l’insanité génocidaire et l’illogisme de nombreux passages de l’ancien testament (les preuves par les écritures). Ceci est facile : l’abbé Meslier avait déjà fait ce travail de recensement il y a trois siècles. En outre les arguments ontologiques de l’existence de Dieu sont facilement démontables pour un moderne (p. 101 et suivantes). Jusqu’ici, le travail de l’auteur demeure relativement classique.

La suite est plus originale : en bon évolutionniste, Dawkins démontre que la religion (en général) est un effet secondaire (un effet raté dit-il) des mécanismes génétiques qui ont structurés les humains pour les aider à survivre ou plutôt pour contribuer à la survie de certains gènes. Cet avantage se faisant au profit de la sélection du groupe, sinon au profit d’un parasite externe ou même au profit d’un « mème » et non d’un gène (Chap. 5, p. 207). Le raisonnement est intéressant.

La dernière partie de l’ouvrage, plus « littéraire » et moins scientifique est sans doute la plus faible.  L’auteur y parle du sens moral : la religion n’est pas nécessaire au développement du sens moral, bien au contraire si on en juge les règles qu’on peut tirer de l’ancien testament. Il met en exergue l’immobilité des dogmes face à l’évolution de l’esprit du temps (Zeitgeist), celui qui nous mène actuellement au politiquement correct féministe, LGBTiste, antiraciste et promeut la science pour combler le vide des religions disparues.

En conclusion, Dawkins s’attaque à des cibles faciles prises au sein de la chrétienté américaine dont les évangélistes forment une communauté fanatisée importante et très active. On est loin des catholiques français (2 % de pratiquants) plutôt modérés n’en déplaise aux activistes de gauche. Bien qu’il reconnaisse la distance séparant ces deux courants l’auteur ne fera aucune concession au dernier.  Son analyse ne fait aucune différence entre les religions toutes considérées nocives en soi. L’origine franc maçonne très française du courant laïc est ignorée, comme l’est le premier génocide antireligieux (déiste mais en fait, athée)  de l’histoire moderne à savoir le génocide vendéen et comme le sont également les génocides bolcheviques et maoïstes portés par des idéologies athées.

La science est considérée comme neutre et susceptible de porter une éthique ; c’est contestable. En fait, elle est parfois fausse, parfois futile, parfois dangereuse, possède un périmètre de validité limité et ses concepts sont souvent inaccessibles au commun. Il n’est pas certain que son développement soit continu : il peut être entravé par la complexité, le manque de crédits ou par sa mise au service des puissants comme dans le Transhumanisme.  

Michéa avait déjà pointé le remplacement de la morale religieuse par le Marché (et sa main invisible), le droit procédural … et les sciences expérimentales. Dawkins n’a manifestement pas lu Michéa. Lorsque l’athéisme se fait anthropothéisme (l'homme se faisant dieu), il peut y avoir du soucis à se faire et face à cette dérive scientiste la religion traditionnelle (dans une pratique minimale avec quelques concessions rationnelles) peut apparaître à nouveau comme une protection individuelle efficace face à l’arrivée de nouvelles dystopies. Le pari pascalien  (dénoncé par l’auteur p. 136) redevient une option plausible permettant de passer juste au-dessus de l’agnosticisme pour accéder à la vie bonne, et si la vie terrestre est moralement bonne, la vie éternelle n’est pas une exigence : le croyant peut ne réclamer pour lui rien de plus que l’athée. 

Sur la forme, le travail de Dawkins est passionnant. Le bigot dogmatique prendra des risques à le lire, mais le croyant à l’esprit ouvert y trouvera l’occasion d’effectuer un petit nettoyage doctrinal. Quant à l'athée pur et dur, ce livre ne lui apportera rien de plus... sauf s'il n'est pas certain de ses convictions.

Rédigé pour Amazon.

D'autres miscellanées

Golias. Revue catholique critique animée par Christian Terras. Présumée chrétienne de gauche, elle est liée au réseau voltaire et à Thierry Meyssan, ce qui la placerait plutôt à l’extrême droite (complotiste) d’après les critères officiels d’aujourd’hui. Voir les fiches Wikipédia.

11 septembre. FAQ du NIST sur l’effondrement du WT7 : https://www.nist.gov/topics/disaster-failure-studies/faqs-nist-wtc-7-investigation
Voyez l’item 36 : Why did NIST withhold from public release limited and specific input and results files for certain collapse models used in the WTC 7 study? (added 11/20/19).

http://echelledejacob.blogspot.com/2019/12/video-pour-personnes-averties-seulement.html   Peut-on illustrer la vidéo par un autre titre que ‘deux p…  qui s’e… sans vergogne, moitié à poil, en public un soir d'été à Strasbourg’ ? Lamentable.

Féminisme intersectionnel https://youtu.be/CAukVtnEy1Y (Vidéo 5m27).  La collision ridicule entre le féminisme et l'anti-racisme.


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