samedi 4 janvier 2020

Karl Popper : la société ouverte (2)

... et ses ennemis. Tome 2. Hegel et Marx. Édition du Seuil.


Note de lecture ...

Le second volume de l’ouvrage précité de Popper est sous-titré ‘Hegel et Marx’. Le cas Hegel sera en fait vite réglé. La critique de Hegel commence par celle de la philosophie d’Aristote entièrement dominée par celle de Platon (traitée dans le tome 1).
Ensuite, l’auteur démontre que la théorie hégélienne du destin est une réplique du système aristotélicien des objets cherchant à retrouver leurs places naturelles. Ces deux philosophes ont joué un rôle important dans la montée de l’historicisme moderne et de son opposition à la société ouverte. Ils ont influencé plus particulièrement la philosophie prophétique de Hegel considéré par Popper, non seulement comme un auteur verbeux et médiocre, mais comme le père du totalitarisme occidental. La critique, féroce, est concentrée sur la quarantaine de pages du chapitre 12 (Hegel et le néo-tribalisme). Ensuite, il n’en reste rien. Si vous avez des livres de Hegel dans vos rayonnages, vous pouvez tout jeter à la poubelle (!)

Marx est traité avec beaucoup plus d’égards que son prédécesseur dialecticien bien que, pour l’auteur, le marxisme soit la forme d’historicisme la plus pure, la plus répandue et la plus redoutable que le monde ait connu. C’est bien au nom de  cet historicisme honni que Popper le combat. Les différentes facettes de la doctrine marxiste sont passées au crible les unes après les autres. Aspects sociologiques, économiques, politiques, éthiques. Tout n’est pas à jeter dans une œuvre et un combat aussi prolifique. Ainsi reconnaît-il (p.83) que son combat pour les exploités « le place à jamais au nombre des libérateurs de l’humanité ». Il n’en pointe pas moins les failles du raisonnement qui l’ont mené à la prophétie de la prise de pouvoir inévitable du prolétariat sur la bourgeoisie au nom d’une théorie « scientifique » des « lois de l’histoire ».

Ce texte est écrit juste après guerre. La situation des prolétaires est alors sans rapport avec le traitement inhumain qu’ils subissaient un siècle auparavant lorsque Marx publiait son manifeste. En occident, la condition ouvrière s’est donc fortement améliorée sans nécessiter une révolution prolétarienne. L’aspect intéressant de la chose, c’est que les objections de Popper qui se justifiaient plutôt bien en 1945 se trouvent remises en question dans le contexte néo-libéral de 2020. La mondialisation et la robotisation laminent désormais les acquis sociaux du siècle précédent et la paupérisation absolue des classes moyennes redonne de la pertinence à un point théorique qui avait fini par paraître obsolète.

Les derniers chapitres (les prolongements) sont sans doute les plus intéressants de l’ouvrage car ils portent sur les problèmes d’épistémologie. Popper montre que l’histoire n’a pas de sens. Il discute et compare l’intérêt de l’irrationalisme, du rationalisme absolu et de du rationalisme critique, celui qu’il supporte dans tous les cas.

Le texte est clair, le style accessible. A lire absolument.

Rédigé pour Amazon sous le titre 'Oublions Hegel, mais Marx a peut-être encore quelque chose à nous dire'


Un projet de lecture à la suite du livre de Popper : Soros et la société ouverte de Pierre Antoine Plaquevent. Ed. Le retour aux sources :
https://www.polemia.com/george-soros-societe-ouverte-pierre-antoine-plaquevent/#_ftnref1   Évidemment, c'est un point de vue de droite. Vidéos de présentation disponibles sur internet.




2 commentaires:

  1. "Évidemment, c'est un point de vue de droite "
    Comme celui de popper

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Pas si simple. A l'époque où Popper écrivait cet article, il était sans problème classé à droite d'une gauche marxiste bien étoffée. Celle-ci a quasiment disparu du paysage politique. En 2020, une partie importante du gauchisme se retrouve sous la bannière du progressisme de Soros, élève de Popper (à mon avis mauvais élève). Par ailleurs, J-C Michéa explique de façon magistrale comment le libéralisme traditionnel ne peut en aucun cas être considéré comme une idéologie réactionnaire. Le mieux est de lire Popper (même, et surtout si on n'est pas d'accord avec ses idées), c'est vraiment intéressant.

      Supprimer

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.