dimanche 14 octobre 2018

Tentative d’analyse de la pensée soralienne

La diversité du courant soralien

  La première idée serait de commencer par l’analyse du livre clé ‘Comprendre l’Empire’ d’A. Soral (2011), ouvrage qui présente les convictions de l’auteur. Mais il est sans doute plus pertinent de s’appuyer sur l’examen des articles et vidéos diffusés sur E&R. Nous vivons une époque de confrontation idéologique intense avec l’émergence des populismes (Trump, Brexit), une vague immigrationniste extra-européenne d’ampleur inédite, l’expression quasi-quotidienne des politiques féministe et LGBT sur les médias dominants, un laïcisme exacerbé, une politique d’État particulièrement agressive … l’ouvrage cité risque d’être dépassé sur bien des sujets. Soral représente, en France, le navire amiral implicite de l’opposition extra-parlementaire donc son site doit être passé au peigne fin. L’avantage de cette démarche est de permettre une analyse ciblée discipline par discipline de l’idéologie soralienne : sociologie, sciences politique, économie, géopolitique, religion, droit et histoire.

Si l’on fait le tour des intervenants sur E&R, on rencontre la difficulté suivante : Certains d’entre eux viennent de la gauche ou de l’extrême gauche (L. Cerise, P . de Brague, F. Cousin, M. Drac, M. Sigaud) d’autres de de la droite ou de l’extrême droite (J-M Vernochet, P . Hillard, D. Viguier, Y. Hindi, etc.). On se trouve devant un groupe comprenant à la fois des marxistes athées et des catholiques intégristes anticommunistes ! Bien entendu, il existe un noyaux commun sur lequel tous se reconnaissent, mais ce noyau lui-même semble flou. Là se trouve peut-être la difficulté de se situer à la fois pour la gauche du travail et la droite des valeurs. Au mieux, peut-on dire de tous qu’ils ne sont pas Charlie. Mais ça ne serait pas suffisant. Tous sont anti-américains (sans être nécessairement russophiles), europhobes et anti-libéraux et généralement anti-mondialistes et anti-sionistes. Certains sont catholiques (avec une réelle méfiance pour le pape François jugé comme cheval de Troie du mondialisme et de la franc-maçonnerie). Hillard semble être le seul royaliste du panel soralien. Le site partage souvent des vidéos de blogueurs ou blogueuses anti-féministes (comme Tatiana Ventose, Virginie Vota ou Stéphane Edouard), de temps en temps celles du Saker francophone, des éconoclastes, plus systématiquement celles de J-M Le Pen et de B. Gollnisch pour leurs commentaires décalés sur la politique courante (ce qui n’empêche pas le mépris profond exprimé pour l’actuel FN (RN) de M L-P), celles de Dieudonné, celles de X. Moreau sur l’Ukraine et la Russie. La position relative à l’islam est compliquée : OK pour les musulmans qui s’en tiennent à une pratique privée de leur religion et acceptent publiquement nos valeurs sociétales traditionnelles. Les autres -idiots utiles du sionisme- doivent être combattus et chassés. La ligne politique globale de E&R se définit donc assez bien comme l’antithèse systématique de la bien-pensance que j’ai exposée dans un post précédent. Elle transgresse aussi systématiquement la ligne rouge posée par le lobby sioniste d’où les très nombreux procès accumulés par A. Soral et les attaques des GAFA (comptes Facebook, Ebay, YouTube, etc.). Le fait d’être « Anti » ne suffit pas à structurer une ligne politique claire mais il faut bien admettre que la réaction violente et haineuse du camp adverse (monde politique et média toutes tendances confondues) a un effet radicalisant et unifiant indéniable.

Après réflexion, l’axe idéologique de E&R me semble reposer sur l’analyse implicite du judaïsme orthodoxe contemporain.

Le judaïsme orthodoxe n’est pas l’ancien testament
Petit retour sur la religion. Au préalable, voyez les vidéos, livres et articles de Youssef Hindi, Laurent Guyénot et de Pierre Hillard sur ce sujet précis. J’avance prudemment ce que j’en ai compris. C’est un sujet complexe pour lequel je ne suis pas spécialiste.
Au départ, Yahweh, Dieu principal du peuple juif (qui semble avoir été plutôt polythéiste à l’origine) est un dieu tribal. Il ne porte rien d’universel. Ses prêtres tiennent le peuple d’une poigne de fer. Pour faire simple, la religion révélée à Moïse sur le Sinaï possède deux composantes : la Torah ou loi écrite qui est l’Ancien Testament, et la loi orale (très ritualisée), secrète, transmise par les prêtres dont ceux de la tribu des Pharisiens. Parmi les autres tribus (Sadducéens, Zélotes, Esséniens, Karaïtes), seuls ces derniers ne reconnaissent pas la loi orale. De même, Jésus ne fonde son enseignement qu’au dessus de la loi écrite. Le christianisme se pose donc bien en héritier légitime du judaïsme de la loi écrite. Après la destruction du second temple en 70 ap. JC, les juifs dispersés (qui ne reconnaissent pas Jésus comme le Messie) mettent la loi orale par écrit : ce sont les Talmud (de Jérusalem et de Babylone), à savoir, la Michna (commentaire de l’Ancien Testament), la Guemara (commentaire du commentaire). En fait, ce qu’ils appellent désormais Torah est le Talmud qui a prééminence sur l’Ancien Testament. Dans le même temps, les juifs chrétiens sont devenus des chrétiens d’orient banalisés. Dans les siècles qui suivent, une composante talmudique ésotérique va peu à peu se constituer : c’est la Kabbale. Si le christianisme est devenu religion universelle en s’hellénisant, le Talmud ou Judaïsme orthodoxe est resté une religion tribale pour tous les juifs disséminés dans l’empire romain. Sa confrontation avec le christianisme et surtout avec l’Église catholique demeurera ininterrompue jusqu’à nos jours. Autre paradoxe : les juifs ashkénazes d’Europe Centrale sont très probablement les descendants de l’ancien Empire Khazar, peuple nomade non sémite et sans rapport direct avec la Palestine[1]. 

Tout ceci ne serait pas dramatique si la scission entre les juifs qui ont reconnu Jésus comme le Messie  et les autres n’était qu’un simple schisme issu d’une même source religieuse. En fait, Judaïsme orthodoxe (qu’on peut aussi appeler talmudisme ou rabbinisme) et christianisme n’ont simplement rien de commun. Il suffit pour s’en convaincre de lire ‘Judaism Discovered: A Study of the Anti-Biblical Religion of Racism, Self-Worship, Superstition and Deceit’ de Michael Hoffman. Un pavé de plus de 1100 pages (en anglais), une étude méticuleuse du Talmud par un chercheur hébraïsant. Voilà qui donne une vision un peu nuancée du rôle des juifs en occident. Je préfère conseiller mon lecteur de mener lui-même ses propres investigations dans cette direction et de se faire son opinion plutôt que de paraphraser cet ouvrage monumental, mais si je dois résumer ce dernier en 3 lignes, voici ce que j’en ai compris : Le Talmud est un mur de livres inaccessibles au non hébraïsant. C’est une pensée matérialiste très encombrées par des considérations sur le sexe et sur l’argent. Il comporte une forte coloration suprémaciste[2] hostile aux goys et aux chrétiens en particulier. L’autorité divine suprême n’y est plus Yahweh mais la communauté déifiée des rabbins[3].



Le soralisme et la pensée d’extrême droite
En pratique, oui, les juifs ont été durement persécutés par l’Église et les États chrétiens d’occident, mais leurs élites ont souvent occupé des postes clés au sommet de ces mêmes États et les persécutions ont servi à ces même élites pour maintenir l’unité captive de leurs peuples sous leur pouvoir féroce. Pour les mêmes raisons, les crimes nazis ont permis l’unité de la communauté juive après guerre bien au delà de ses convictions religieuses. Hitler a ainsi permis de donner une forme incontournable au sionisme : l’État d’Israël parrainé tant par les États-Unis que par l’URSS. Le nazisme a été immensément profitable au mouvement sioniste, et il l’est resté avec la montée en puissance de la religion de la Shoah promue et imposée partout comme croyance universelle.
Par ailleurs, les conversions forcées surtout localisés dans la péninsule ibériques aux XVII-XVIIIème siècles ont mené à l’émergence des maranes (ou marannes) ou crypto-juifs (chrétiens d’apparence) dans les hautes sphères politiques européennes. Au départ, les juifs étaient interdits dans les loges, mais les maranes n’avaient plus ce problème. C’est ici que se place le travail de Pierre Hillard sur le rôle des juifs dans la propagations des idées qui ont sapé la royauté avant d’amener la Révolution Française. On retrouve bien sûr les thèmes de l’extrême droite d’avant guerre : les juifs, la Franc-Maçonnerie[4], la Révolution Française mais aussi les juifs, la banque, le libéralisme, l’européisme, le cosmopolitisme, le mondialisme … et l’accord de ces idées nouvelles avec les prescriptions du Talmud. Mais le travail de P. Hillard est assez précis pour mériter de s’y intéresser de près.
Ce dernier relève notamment l’influence judaïque au sommet du pouvoir ecclésiastique pour mener les réformes de Vatican II[5]. Laïcisme, féminisme, migrationnisme et LGBTisme sont vus comme la continuation du travail de sape mis en place par la Nouvelle Synagogue (pour reprendre la terminologie de P. Hillard) contre la culture traditionnelle, la famille et la religion catholique il y a trois siècles. Voilà pour la droite. Mais qu’en est-il pour la gauche ?

Le soralisme et la pensée d’extrême gauche
Il n’y a aucun courant social démocrate à E&R. Ce serait antinomique avec la nature profonde du soralisme. Mais d’anciens gauchistes peuvent y trouver toute leur place. C’est le cas emblématique d’un Francis Cousin dont le discours est du marxisme 100 % pur jus. Il est difficile de faire la différence avec un marxiste bon teint des années soixante. D’ailleurs il n’y en a plus ! La pensée situationniste y est également présente. D’anciens sociologues communistes comme Michel Clouscard sont tirés de l’oubli. Cette extrême-gauche soralienne, c’est l’autre gauche sans préjugés anti-antisémites. Le rôle clé des juifs dans la révolution bolchevique et les crimes massif qu’elle a commis n’est plus nié et cette reconnaissance supprime le caractère schizoïde de la pensée communiste. La dénonciation du pouvoir du capitalisme financier peut s’exercer sans complexe. Ce n’est plus le cas au sein de la gauche actuelle qui finit par se retrouver pieds et poings liés par la pensée libérale, contrainte à limiter ses combats à la défense impuissante des ’minorités ‘ victimaires et de l’Europe sociale.  Problème : ce sont des luttes d’arrière-garde dans le cadre d’une « bien-pensance » dominante. La position d’un Mélenchon illustre bien les limites de ce combat : la moindre transgression verbale des limites permises lui valent un coup de règle sur les doigts, le médiocre épouvantail FN (RN) étant maintenu debout coûte que coûte comme borne frontière commode de l’empire du mal. E&R occupe donc le vide laissé à la fois par l’extrême gauche et l’extrême droite institutionnelle. C’est ce qui fait son originalité. Il est probable que E&R sera interdit un jour ou l’autre et peut-être plus tôt qu’on le pense. L’élimination physique de son mentor est parfaitement envisageable (ce sera un simple ‘accident’). Bien entendu, ça ne changera rien, tout mouvement suscitant naturellement son contraire : les dissidents s’en trouveront confortés dans leur opposition radicale. L’avenir n’est ni radieux, ni apaisé.

Conclusion

Le soralisme tel qu’il s’exprime par la voix des divers intervenants sur E&R n’est pas sans rappeler la pensée maurrassienne d’avant guerre mais il s’en distingue par un contexte inédit, sans rapport avec celui de l’entre-guerre. En effet : l’hypothèque communiste est définitivement levée ; le modèle soviétique n’est plus une option. Celui-ci est désormais réinterprété non pas comme l’étape historique qui suit le capitalisme, mais comme un outil d’éradication de la vieille société agraire préparant le terrain pour un capitalisme ‘moderne’. Le capitalisme financier régit en sous-main la quasi-totalité de la planète qu’il détruit à moyen terme par la dette et l’exploitation effrénée des ressources. Localement, la culture traditionnelle occidentale se délite à grande vitesse, le pouvoir de l’Église n’est plus que l’ombre de ce qu’il a été et les politiques nationales ne se distinguent plus vraiment, noyées dans la corruption et le bricolage court-termiste. Il faut bien réaliser : l’éradication des classes moyennes occidentales -notre éradication- est à l’ordre du jour. La censure s’installe dans un lit d’hypocrisie. Au niveau géopolitique, l’UE nous soumet avec la complicité de nos élites, et de leur côté l’Empire et son allié israélien s’opposent à tout ce qui leur résiste mais leur légitimité (et leur bon sens) ayant disparu, la guerre d’agression finit par être leur seule option. Côté anti-immigrationnisme, Soral met en garde ses lecteurs contre l’émergence d’un ‘national-sionisme’ qui ferait illusion et détournerait le mécontentement populaire identitaire vers un faux ennemi masquant la domination effective de la « communauté de lumière ».
Face à tout cela, l’Asie monte en puissance : elle est visiblement appelée à dominer le monde un jour si celui-ci n’est pas vitrifié avant par l’hubris d’un empire devenu fou. L’occident est moribond. Pleurons le. Pleurons sur son agonie. Évidemment, ce processus mortifère ne ressemble à rien de ce que notre histoire a connu par le passé. Ce serait trop simple sinon nous l’aurions déjà anticipé. 

Au milieu de ce chaos, il est tout à fait normal que les frontières idéologiques bousculées par des politiques brutales se réorganisent autour de thèmes nouveaux. Mais si les briques sont parfois anciennes, les constructions qui les utilisent sont parfaitement nouvelles.

11/10/2018
Version PDF

NOTES
1. https://blogs.timesofisrael.com/leaked-report-israel-acknowledges-jews-in-fact-khazars-secret-plan-for-reverse-migration-to-ukraine/ ‘Leaked report: Israel acknowledges Jews in fact Khazars; Secret plan for reverse migration to Ukraine’ : Blog de Jim Wald du 16 mars 2014, Journal israélien ‘Times of Israël’
2. Ce suprémacisme s’exprime publiquement et sans complexes chez des gens comme B-H Levy.
3. L’opinion des rabbins se dégageant des vidéos que ceux-ci enregistrent à l’intention de leurs publics est  emblématique. Voyez celles de Rav Ron Chaya, Rav Touitou, Rav Yehouda Ben Ichay, Rav Raphaël Pinto ou Rav Haim Dynovisz sur YouTube. Privilégiez des thèmes comme Edom ou Gog et Magog. Un résumé : https://youtu.be/q7uURYiEB8k (Provocation à la haine).
4.Le spécialiste de la Franc-Maçonnerie à E&R est Stéphane Blet, ancien Franc-maçon, pianiste compositeur de métier.
5. Pour Hillard, le projet ultime du judaïsme orthodoxe est l’instauration d’une religion universelle pour les goys : le Noachisme. Cela passe par l’émasculation préalable des religions existantes. Côté catholicisme, l’affaire est déjà bien avancé. Ce projet eschatologique accompagne le fantasme d’une gouvernance mondiale dont Jérusalem serait la capitale (Attali).

3 commentaires:

  1. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

    RépondreSupprimer
  2. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

    RépondreSupprimer
  3. Le judaïsme est la religion du Père dans la Trinité des 3. Mais la conscience de Dieu ne suffit pas à la déclarer supérieure. La religion de la Miséricorde (intelligence de l'Amour, çàd Amour et Esprit) est supérieure en tout, à ses 2 piliers Judaïsme (Conscience) et Islam (Pureté).
    Mefions nous de la construction du 3ème Temple de Jérusalem. Aucune raison de rebatîr ce Temple. Le vrai Temple est la Terre et il fait 40.000km, car Dieu est partout, et pas confiné dans les murs d'un édifice.
    Le messie est bientôt là, dans le retour triomphal des valeurs et du dernier mystère de Jésus, en chacun de nous.
    Cf. la Haute Prière sur le FB de Pierre Hamalian

    RépondreSupprimer

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.